Comment l’IA peut sauver le Monde

Comment l’IA peut sauver le Monde

L'essai qui suit est une version légèrement rééditée d'un article que j'ai co-écrit avec Nahhu fin 2017 et qui nous avait permis de remporter la Parole aux Étudiants 2018, sur le thème "Vous avez les clés du monde, que faites-vous ?".

Aujourd'hui, je n'écrirais plus cet article.
Parce que je ne crois plus en la capacité de cette société à se sauver elle-même. L'Intelligence Artificielle est une solution endogène à une société qui cherche le rendement et la réponse à des questions. Une solution structurelle, certes, mais au sein d'une société qui cherche à progresser, et non à se réinventer.
Nous sommes à la fin d'un âge, celui où la science prime.
Nous sommes à la fin d'un âge, car il y a des signes qui ne trompent pas.

Vers 1500, notre vision médiévale du monde s'est effondrée. Cela faisait plus de 500 ans que la sécurité morale était pourvue par l'Église, qui arbitrait ce qui était juste ou bon, de ce qui était faux ou mal. Cette vision s'est effondrée après un siècle de perte progressive de foi envers les hommes d'Église qui manquaient à leurs devoirs—corruption, arrangements et viol des principes religieux—à l'issu duquel une révolution, menée par Martin Luther, éclata.

Ce socle de la pensée humaine détruit, nous avons collectivement décidé de dominer la nature, en utilisant la science et la technologie pour vivre dans ce monde. Nous avons cherché à créer une sécurité matérielle pour remplacer les certitudes spirituelles que nous avions perdues. Nous nous sommes fabriqués l’illusion que nous vivions dans un univers entièrement explicable et prévisible, où les évènements fortuits n’avaient aucun sens. Pour entretenir cette illusion, nous avons eu tendance à nier toute preuve contraire à nos convictions, et avons adopté une attitude de scepticisme absolu.

Et voilà qu'aujourd'hui encore, les signes d'un effondrement apparaissent.
La science n'arrive plus à faire consensus :

  • Les sciences exactes (maths, physique, chimie) nous fournissent des avancées technologiques qui nous mènent droit dans le mur. Le capitalisme catalyse et se nourrit de ces avancées technologiques, impliquant destruction écologique, raréfaction des ressources naturelles et scandales humanitaires.
  • Les sciences statistiques (médecine, biologie) ne nous fournissent que des corrélations, qu'elles maquillent bien souvent en implications. L'absence de preuves a été trop de fois confondue avec la preuve de l'absence. Les experts sont trop nombreux et n'en sont plus vraiment. L'empirisme ne prouve rien. L'induction est un mirage intellectuel, le rafinement de notre monde est trop grand—à l'échelle intra-individu (le vivant) comme inter-individus (effets de réseau)—pour pouvoir rigoureusement identifier les cascades de causes à effets.

Depuis que j'ai écrit cet article, j'ai beaucoup évolué spirituellement, et j'ai la certitude que le bonheur ne se trouve pas ici.
Il se trouve dans une société qui s'est réinventée, qui s'est satisfaite de ce que la science a déjà prouvé, qui s'est libérée de l'obsession du bien-être matériel afin d'ouvrir son esprit à une nouvelle conscience du monde, plus juste.
Un paradigme spirituel, vers lequel nous sommes en train de basculer, assurément.

Si je publie cet article en dépit de ce que je viens de dire, c'est parce que je pense intéressant de te montrer comment ma pensée pouvait s'exprimer il y a quelques années, et son contraste avec ma pensée actuelle.
Le véritable essai, c'est ce que tu viens de lire.

e.


Comment l’IA peut sauver le Monde

Changeons les choses sur Terre avant de rêver d’ailleurs.

Dans la dissertation qui suit, l'axiome de base concerne la place révolutionnaire que l’Intelligence Artificielle occupera dans les sociétés de demain. Si la signifcation précise l’Intelligence Artificielle (IA) vous est étrangère, il est probable que certaines des mesures proposées ci-après vous paraissent irréalistes. Cela provient souvent d’une confusion entre ce qu’est l’IA et ce qu’elle n’est pas. Ici, nous en prendrons la définition suivante [1] :

Une IA est une puissance gigantesque d’optimisation et de compréhension entraînée par les données qui l’alimentent.

Ce que cette dissertation ne sera pas : une énumération de mesures localisées destinées à résoudre un nombre circonscrit de problèmes, ou bien un pamphlet exhortant à un « changement des mentalités ». Ce que nous allons tenter d'établir : une solution systémique globale, un paradigme novateur, bientôt rendu possible grâce à l’IA.

Notre propos suivra la structure suivante : d’abord, nous verrons en quoi nombre de problèmes majeurs sont assimilables à une unique problématique : la stabilisation des « Équilibres Vertueux Instables ». Nous en identifierons les causes d’instabilité et proposerons une solution pour les faire disparaître.

Nous le verrons, ces causes proviennent elles-mêmes d’un des concepts fondamentaux du modèle de gestion des sociétés depuis la Grèce Antique : la centralisation (vaste concept que nous expliciterons précisément). Jusqu’alors, elle était paraissait inévitable, semblait être le « seul compromis ». Or, même s’il est encore tôt pour que l’ensemble des sociétés le réalisent et s’en réjouissent, elle sera bientôt obsolète. Aujourd’hui, l'alliance du développement galopant de l’IA et de l’explosion des données laisse entrevoir la possibilité d’inverser ce qui était devenu l’ordre naturel des choses. Un paradigme de décentralisation pourrait enfin permettre aux Équilibres Vertueux d’emporter la bataille face aux cercles vicieux infernaux.

Cette contribution décline ce concept de décentralisation aux secteurs exécutif, législatif, économique, judiciaire et éducatif. Nous prions le lecteur, d’une part, de s’efforcer d’en ressentir les rapports synergiques et, d’autre part, de bien vouloir comprendre que de nombreux résultats et implications logiques n’ont pas pu être développés.


Une société d'Ouroboros

La violation des accords climatiques internationaux, le taux de sucre dans les produits transformés, la décadence des titres de presse : de gravités inégales et d’apparence décorrélés, ces phénomènes ont pourtant une racine commune.

Imaginons un ensemble de pays s’engageant à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre sur une durée déterminée, diminuant de fait leur productivité immédiate. Cet état est un état d’équilibre : chacun des partis en présence accepte de réduire son efficacité puisque tous verront la leur diminuée d’un taux équitable. Cependant, imaginons maintenant qu’un des participants décide dans son coin de ne pas respecter le contrat. Cela peut arriver pour deux raisons : soit il est animé par l’avidité d’une meilleure production que tous les autres pays qui, eux, se serreraient la ceinture ; soit il ne fait pas confiance aux autres et, partant du principe que tout le monde le fera, le fait aussi pour ne pas être le dindon de la farce. L’équilibre de départ, qui était vertueux, vole en éclats.

Dans un registre plus léger, attardons-nous sur le taux de sucre contenu dans les produits transformés. Sachant qu’entre deux produits identiques, le plus sucré sera en majorité préféré par le consommateur (sans même qu’il puisse identifier la raison de son choix) une escalade de ce taux débute alors, en miroir de la lutte pour les parts de marché chez les acteurs de l’agro-alimentaire.

Le même phénomène se produit pour les titres de presse : c’est parce que l’on réagit inconsciemment davantage aux énoncés émotionnels plutôt qu’aux énoncés factuels que le journalisme a progressivement muté en dictature de l’instantanéité et du sensationnalisme.

Les deux derniers exemples peuvent être vus comme la loi de l'offre s’adaptant à la demande. Le premier exemple lui, peut-être vu à travers le modèle de théorie des jeux du dilemme du prisonnier à n joueurs.

Plus généralement, ce que tous ces problèmes ont en commun est la chose suivante : qu’il s’agisse de relations entre pays ou de relations consommateurs-producteurs, les comportements de chacun des partis s'influencent mutuellement dans le mauvais sens, celui aboutissant à un résultat sans appel : tout le monde est perdant [2].

L'origine du problème est au centre

Après de longues réflexions, nous en sommes venus à la conclusion que toutes ces causes d’instabilité trouvaient leurs racines en trois autres, plus conceptuelles :

  1. l’asymétrie des risques (ce concept sera développé dans la partie réservée à l’éducation),
  2. l’impunité a priori lorsque l’argent ou les relations contournent les lois,
  3. et la demande non-conscientisée du consommateur.

Le défi est donc le suivant : apporter une solution conceptuelle mais concrètement applicable pour palier ces trois causes d’instabilité.

Si cela peut praraître décourageant à première vue tant le sujet semble vaste, ce désarroi n’est que le reflet de la profondeur avec laquelle nous avons intériorisé l’un des concepts à la base des sociétés depuis 2500 ans. Un concept si naturel qu’il ne viendrait pas à l’esprit de beaucoup de le questionner. Ce concept, c’est la centralisation :

La centralisation est le processus par lequel le pouvoir décisionnel croît à mesure que l’échelle à laquelle il s’applique grandit.

Réjouissons-nous d’une bonne nouvelle : il est possible d’inverser le modèle de centralisation en un paradigme de décentralisation. Sa viabilité (qui sera le cœur du développement de cette réflexion) est, pour la première fois dans l’histoire de l’Humanité, rendue possible par le développement de l’IA. Il est absolument crucial que les peuples et leurs dirigeants le réalisent et se saisissent de cette possibilité révolutionnaire.

Expliquons d'abord clairement en quoi l’organisation des sociétés telles que nous les connaissons repose en profondeur sur le concept de « centralisation ». Quiconque s’essaie à résoudre une problématique sociétale réalise très vite la chose suivante :

Gérer une organisation est, par essence, l’activité paradoxale de vouloir apporter des réponses génériques à des ensembles de situations toutes différentes les unes des autres.

Et plus une solution essaie de s’adresser à un grand nombre de cas, moins cette solution est efficace pour chacun d’entre eux. Jusqu’aujourd’hui, la gestion des organisations reposait donc sur cette recherche du « meilleur compromis ». Nous verrons que cela est vecteur de lourdes conséquences dans tous les domaines, et tout particulièrement dans le domaine politique.

Décentraliser pour mieux régner

La décentralisation est le retour aux traitements microscopiques. Face à l’infinie diversité des situations, l’humain, dans l’incapacité de procéder à un traitement au cas par cas, a été contraint de dénaturer chacune d’elles afin de les faire entrer dans un cadre de réflexion et de proposer des modèles génériques. Nous sommes face à une situation de type « Lit de Procuste [3] ». Cette incapacité, l'lA ne l'a pas.

Nous pouvons alors commencer à poser la bonne question : à quoi ressemblerait une société au pouvoir décentralisé ? Nous allons décliner la réponse en quatre aspects : politique (législatif et éxecutif), économique, judiciaire et éducatif.

De la politique

Concernant le législatif et l’exécutif : un pouvoir décisionnel fonction croissante de la hauteur du point de vue aboutit à un pilotage à l’aveugle, ignorant les problèmes concrets que rencontre chaque citoyen à son échelle. En généralisant, on aboutit à une solution efficace en moyenne seulement. Le corollaire de cette philosophie, tout aussi regrettable, est la décroissance de la responsabilité politique à mesure que la hauteur du point de vue diminue. Au bout de cette chaîne, un citoyen qui en est finalement dépossédé. Schématiquement, le citoyen, concerné par une situation précise, se dépossède de son pouvoir de résolution et le transmet à une instance supérieure qui ne pourra jamais la connaître.

Une des conséquences, plus importante encore, de la centralisation du pouvoir est la suivante : un pouvoir centralisé est incroyablement vulnérable aux tentatives de corruption. Un bref coup d’œil à l’occupation du parc immobilier entourant le Parlement Européen suffit pour le comprendre : celui-ci est intégralement constitué de lobbyistes.

D’une manière générale, quels que soient les domaines concernés (journalisme, industrie, etc.) c’est la centralisation des pouvoirs qui rend possible les connivences. La décentralisation du pouvoir législatif et exécutif consisterait ici en une autonomie presque totale des instances gouvernementales les plus proches du terrain. Des agglomérations de villes par exemple, dans une logique de cantons Suisses encore plus poussée. Une IA qui modéliserait le fonctionnement de la zone considérée dans un espace de dimension inconcevable pour l’humain sans en omettre une seule donnée, ferait des propositions visant à en optimiser la gestion en termes de consommation durable des ressources, d’allocation du budget responsable, de fréquence des transports, etc. Elle serait le collaborateur parfait, à la vision globale, pour gérer effectivement la zone à laquelle elle est circonscrite. Attention, nous ne parlons pas de Big Brother mais bien d’un assistant à la capacité de mémoire et de calcul humainement inimaginable, qui ferait des propositions d’optimisation en temps réel, à partir d’un apprentissage permanent se nourrissant de tous les types de données produits par la population et les infrastructures que celle-ci utilise.

Un autre effet heureux de la décentralisation des pouvoirs législatif et exécutif, en plus de s’attaquer à bras le corps aux facteurs d’instabilité des EV est que les meilleurs modèles subsisteront par effet Lindy [4]. En effet, certains cantons optimisés se démarqueront probablement des autres dans le temps en terme d'attractivité. Ils pourraient alors être étudiés et, par rétro-ingénierie, les facteurs responsables de leur succès pourraient être extraits et adaptés puis injectés dans les autres cantons.

À propos de l’économie

Il n’est pas raisonnable de penser ressentir les effets d’un paradigme de décentralisation politique sans qu’il n’agisse de concert avec la décentralisation de la création monétaire : tant que celle-ci sera centralisée, le pouvoir le restera. Actuellement, la Banque Centrale Européenne crée la monnaie fiduciaire, tandis que la monnaie scripturale, représentant 90% des flux monétaires, est créée par les banques privées lorsqu’un citoyen Européen contracte un prêt. Il est important de comprendre que les banques ne prêtent pas l’argent qu’elles possèdent, la loi ne les obligeant à posséder en fonds propre que 5% du montant crédité. Le vocabulaire n’a en fait jamais vraiment été approprié : 5% du montant du crédit est prêté, 95% est créé (ex nihilo) par un jeu d’écriture [5]. La création monétaire est donc centralisée entre, pour une petite part, la Banque Centrale Européenne et, majoritairement, les banques privées.

La décentralisation de la création monétaire passera donc par l’avènement des crypto-monnaies qui rendront impossible la centralisation des flux. Certes, les crypto-monnaies sont décriées pour l’évasion fiscale qu’elles permettraient [6]. Avant de répondre à cela, on peut se demander si l’évasion fiscale est actuellement empêchée par les banques, ou si ces dernières ne craindraient simplement pas d’entendre leur glas sonner. En effet, si les crypto-monnaies se développent, les citoyens n’auraient plus besoin de banques pour stocker leur argent, ni pour en échanger, ni pour contracter un crédit (des crypto-alternatives de prêt florissant depuis quelques temps, comme Bitbond par exemple). De plus, contrairement au système centralisé actuel, le concept de blockchain (livre des comptes incorruptible consultable par tout le monde) sur lequel reposent les crypto-monnaies rend tout montage financier rocambolesque impossible. Seul le parfait anonymat des agents économiques pose problème. Là encore, des solutions utilisant de l’IA commencent à émerger (Open Mined par exemple) tout comme des solutions proposant de réduire la consommation énergétique actuellement très problématique du minage des crypto-monnaies (CryptoHour, mécanisme de Proof-Of-Stake plutôt que Proof-Of-Work, entre autres).

Une justice éclairée

Concernant le pouvoir judiciaire, la déclinaison du concept de décentralisation y serait également révolutionnaire et s’attaquerait, entre autres, à une des causes d’instabilité des EV : l’impunité a priori apparente lorsque l’argent contourne les lois. Rappelons dans un premier temps qu’elle était en partie due aux connivences naissant du modèle centralisé de l’organisation des pouvoirs et qu’elle serait, de fait, déjà largement atténuée après une décentralisation politique et économique. Néanmoins, les progrès stupéfiants faits par l’IA en termes de compréhension du langage et des émotions humaines par la détection des micro-expressions pourraient nous laisser envisager assez prochainement des IA « avocates » dont le rôle d’intermédiaire permettrait entre autres de préserver un anonymat total entre le jury et les parties impliquées. Dans cette idée, une IA assistera également le jury dans l’établissement du verdict. Il n’y aura plus besoin de s’en remettre à des lois générales pour juger des situations particulières. Au contraire, une implémentation d’un droit général dans la base de données d’une IA, couplée à un entraînement continu à comprendre la façon dont les hommes se représentent la Justice (par apprentissage intelligent des verdicts rendus), révolutionnera l’application de la Justice dans les sociétés humaines.  On ne subirait plus le poids des distances entre les réalités et le modèle auquel on cherche à les faire coller. Sans parler de la réduction drastique des délais avec lesquels la Justice serait rendue.

Une éducation pour tous chacun

Pour finir, traduisons le concept de décentralisation dans l’éducation. La situation est claire : en termes de stimulation intellectuelle, il est tout sauf optimal de faire suivre à tous un programme pré-établi, au même rythme. Ici encore, une problèmatique de type « Lit de Procuste ».

Parallèlement, le temps nous l'enseigne et les études l’approuvent : l’apprentissage par jeux-vidéos est « neuro-ergonomique » : il utilise le cerveau de façon efficiente, stimule l’envie et la capacité de concentration. Cela n’a rien de nouveau, tous les mammifères apprennent en jouant. On pourrait donc imaginer une IA générant, pour chaque élève, un jeu vidéo répondant à ses critères d’apprentissages et d’amusement, en réalité virtuelle immersive, allant à son rythme, et lui transférant un flux continu de connaissances. On réconcilierait enfin l’amusement et l’apprentissage et l’éducation connaîtrait sa prochaine (première?) révolution. Une part fixe essentielle, cependant, devra subsister dans chacun des programmes personnalisés.

Le premier de ces concepts doit être la prise de conscience que l’Humanité est entrée dans une nouvelle ère, celle de la collaboration, avec des systèmes intelligents dépassant notre capacité mémorielle, de classification et d'optimisation. Il est alors indispensable de comprendre que le nouveau moteur de la sélection naturelle sera la capacité à cultiver une valeur complémentaire à celle de l’IA.

Un deuxième concept important à inculquer est le principe des risques partagés, déjà quelque peu évoqué jusqu’ici. Actuellement, chacun d’entre nous, dans tous les secteurs, s’expose à nombre d’asymétries des risques sans le savoir. Si j’achète une voiture à un garagiste qui la sait défectueuse, il y a asymétrie flagrante et le procédé paraît objectivement malhonnête. Seulement, des asymétries cachées bien plus subtiles existent. La finance dans son sens le plus large a contribué à populariser ce type d’asymétries, notamment via les processus de transferts de risques : certains se retrouvent à tirer les bénéfices de risques qu’ils n’ont pas pris. Les chefs d’entreprises également, mandatés par les actionnaires, réformant la gestion de l’entreprise, mais ne subissant aucun préjudice en cas de catastrophe. Ce sont ces concepteurs d’insecticides ne mangeant que du bio, ces entrepreneurs de la tech qui interdisent à leurs enfants d'être sur les réseaux sociaux ou d'utiliser des écrans.

Le risque doit être valorisé, encouragé et soutenu, mais ses conséquences doivent être assumées par son initiateur. Les gens doivent assumer les risques qu’ils imposent s’ils peuvent tirer des bénéfices. Il est inadmissible que l’on puisse imposer des risques à autrui tout en étant protégé.

En fin

La décentralisation des pouvoirs décrite jusqu’ici rendrait systémiquement impossible l'émergence de singularités (petits groupes de gens possédant une force décisionnelle gigantesque). De plus, celle-ci entraînant un raccourcissement des chaînes structurelles de toute organisation, la tentation de transfert de risque à cette autre personne—presque abstraite—devrait déjà par là-même être considérablement diminuée, puisqu’il ne serait plus invisible : nombre de processus se dérouleraient à l'échelle locale.

Enfin, l’éducation devrait éclairer les déterminismes que notre biologie d’humains nous fait subir : biais cognitifs, mécanisme de sécrétion de la dopamine, de l’endorphine, de la sérotonine, fonctionnement du sommeil, de la mémoire, etc. Cela réduirait grandement le champ au dernier facteur d’instabilité des EV, à savoir la demande inconsciente du consommateur.

Évidemment, la refonte radicale de notre système autour de la décentralisation, concept inverse de celui sur lequel a depuis toujours reposé le paradigme actuel, devra être progressive. L’éducation pourrait en être la première impulsion.

L’objectif de cette réflexion était la stabilisation des EVI. Après avoir réfléchi aux causes de cette instabilité, nous avons identifié la centralisation comme le concept sur lequel avait dû reposer la structure de toutes nos organisations, l’humain ne pouvant seul mieux faire. Aujourd’hui cependant, une vision pétrie du concept de décentralisation est rendue possible en pratique grâce à l'IA. C’est avec ferveur que nous avons tenté de la décrire le plus concisément possible.

e.


Notes

[1] Cette définition correspond plutôt à un programme de machine learning tournant sur un puissant processeur. Mais par abus de langage conscient, nous parlons ici d’IA.

[2] Cette dynamique peut être vérifiée en l’appliquant aux exemples suivants : trafic d’êtres humains, tragédie des biens communs, scandales sanitaires latents, avec en têtes d’affiche les nanoparticules, les perturbateurs endocriniens, etc.

[3] Dans la mythologie Grecque, Procuste était un hôte particulier, qui étirait ou coupait les membres de ses invités pour faire parfaitement correspondre leur taille à celle du lit sur lequel ils dormaient.

[4] Nom donné au filtre du temps qui fait émerger les organismes les plus aptes à survivre, donc les plus intelligemment conçus.

[5] C’est ce qu’on appelle l’argent-dette.

[6] Certaines crypto-monnaies, comme Z-cash ou Monero, sont totalement anonymes.